Une présentation à voir absolument :
Diaporama sur la Commune
Mais aussi images provenant de
La Commune en images, La Découverte, 1982
La Commune photographiée, RMN, 2000 :
Le blog de Natalie Petiteau vise à établir le lien entre ses lecteurs, ses étudiants, ses auditeurs libres et à donner des informations sur les cours à venir, les publications futures, etc.
C’est
en fait par ce livre que Alain Corbin s’est fait connaître. Sa genèse se trouve dans
sa thèse, car les Limousins à Paris étaient logés dans les quartiers où se
trouvaient les «filles soumises». C’est alors qu’il a eu l’idée de
travailler sur la prostitution à Paris. Jusqu’alors l’histoire de la sexualité
n’existait que par l’histoire démographique. L’histoire des « filles de
noces » permet de lier anthropologie historique, histoire des sensibilités
et des émotions, histoire de la psychologie collective, histoire de la virilité
et de la misère sexuelle masculine : il y a donc là une voie d’accès à la
compréhension du XIXe siècle. Le processus de surveillance des
«filles de noces» met en évidence tout ce que sont les craintes de
la société du XIXe siècle : argent, morale sexuelle, maladies
vénériennes mais aussi doctrine du mal nécessaire, prostitution et misère
sexuelle sont liées à imaginaire social, aux structures sociales, aux pratiques
sociales
Alain Corbin a rencontré les
parfums lourds et capiteux à propos des maisons closes. Il y a compris qu’ils
contribuent à une identification sociale et culturelle de la prostituée et de
son univers. La putain est la fille qui sent mauvais, la prostituée est
supposée sentir mauvais parce qu’elle est tenue pour responsable d’un
pourrissement de la société. Il s’est donc dans ce livre donné pour but
d’étudier l’usage de l’odorat et sa contribution à élaboration de l’imaginaire
social dans seconde moitié du XIXe siècle. Ce livre n’est ni une
histoire des parfums ni une histoire des odeurs, mais il analyse comment une
référence olfactive désigne une personne, comment la création des types sociaux
fait intervenir la référence olfactive. Il étudie aussi les discours des
savants sur les dangers des odeurs. Il livre donc une histoire des sensibilités
en ce sens qu’il analyse la réception et l’appréciation des messages
sensoriels. Les élites du XIXe siècle cherchent à ne pas avoir
d’odeur, pour se distinguer du peuple, puis à se parer de parfums légers.
Ici, Alain Corbin explore le
champ des sensations visuelles. Il s’efforce de retrouver la cohérence des
systèmes de représentations. Il y a là aussi un travail contre les dangers de
l’anachronisme : faire l’histoire des sensibilités, c’est révéler que la
notion de « société traditionnelle » est une grande création du XIXe siècle, c’est lutter contre le passéisme, c’est aussi lutter contre l’idée que
plus on avance dans le temps, plus on avance dans la civilisation. Un individu
qui regarde le bord de mer en 1800 peut y voir les traces du déluge, tandis
qu’un autre peut se questionner sur histoire géologique : tout le monde ne
lit pas l’espace de la même manière. Il n’y a pas de paysage en soi, chacun a
une façon de se l’approprier. Pendant longtemps, la mer n’a pas existé dans les
imaginaires collectifs, il n’y a pas de mer dans le jardin d’Eden. Le désir de
contempler les rivages fait partie d’un basculement des systèmes
d’appréciation, on observe en parallèle une attirance pour la mer, la montagne, la
forêt, le désert. Entre 1755 et 1830, le rivage est devenu un lieu fascinant
entre autres parce que lieu de confluence entre le divin, l’animal, l’humain,
l’eau, la terre et le vent, les vivants et les morts. À l’anxiété de la haute
mer succède le plaisir, l’eau devient un vecteur de sensations, avant 1750 se
baigner était bon pour le peuple et ne concernait pas les élites.
Le 16 août 1870, dans l’arrondissement
de Nontron, en Dordogne, un jeune noble est mis à mort dans
d’atroces souffrances, sur le champ de foire, pour avoir crié «Vive la
République». Il existe dans cette région une tradition de violence contre
les nobles, une tradition rumorale aussi (pex rumeur, sous la Monarchie de
Juillet, selon laquelle les riches vont forcer les pauvres à manger de la
paille, ou, en 1849, qu’ils vont atteler les paysans à des jougs). La crise de
1870 aboutit à la quête du bouc émissaire qui aurait pu être un curé ou un
républicain, d’ailleurs on s’imagina, devant cet homme qui a crié « Vive
la République », que c’était le cas. On soupçonne les prêtres de soutenir
les Prussiens en leur donnant de l’argent. On suppose de plus qu’il existe une
alliance entre ces deux catégories d’ennemis : les nobles et les
républicains. Il s’agit d’exorciser la peur de la défaite, de déjouer le
complot fomenté par les ennemis, prêtres, nobles et républicains, sur fond
d’ascension du sentiment national. La volonté d’Alain Corbin a été de
comprendre la violence inouïe qui s’est exercée contre ce jeune noble, Alain de
Moneys. En fait il existe un espace, d’environ 40 km2, fort marqué
par la violence durant tout le XIXe siècle. Comprendre les
mécanismes psychologiques qui ont conduit à ce crime politique conduit à faire
une histoire des rapports sociaux. Il y a donc là un drame cohérent et non pas
un fait-divers. Alain de Moneys est mort pour n’avoir pas compris les logiques
à l’œuvre sous ses yeux, il a tenté de dissuader les gens qui le frappaient en
fonction de ses repères à lui, en se défendant naïvement de n’être pas
républicain, il n’a pas senti la profondeur de la rage issue de tout un
imaginaire de la menace. Ce crime répondait à des logiques de l’angoisse. La
noblesse périgourdine, aux yeux des paysans de 1870, est héritière de celle qui
est revenue avec le roi en 1814.
Alain
Corbin met ici en évidence la force des sensibilités auditives, qui identifient
un terroir et un espace sonore. L’attachement au clocher est fondamental dans
la France rurale du XIXe siècle, ce qui se lit par exemple dans le refus de
laisser décrocher les cloches, le désir de les conserver même quand l’unité
paroissiale a disparu et que l’ancienne église est désaffectée. L’opération de
la fonte est un moment très fort de la sociabilité villageoise. La cloche
rythme la vie paysanne et sert de signe de rassemblement, elle est aussi
expression de la peur, du deuil, de la colère. La maîtrise de l'usage de la
cloche est un enjeu de pouvoir important. Les cloches de la terre traitent donc
un thème essentiel à la compréhension du monde rural et de ses mentalités.
Les
thèmes traités dans les cloches de la terre se retrouvent dans l’ouvrage mené sur les traces
d’un inconnu : il s’agit pour
Alain Corbin d’y inverser les procédures de l’histoire sociale du XIXe siècle, de quitter les procédures consistant à analyser les paroles ouvrières,
des paroles des femmes, car il y a là des acteurs qui par le fait de prendre la
plume ont tout de même eu un destin exceptionnel. Il s’emplie dans ce livre à
recomposer un puzzle à partir d’éléments initialement dispersés, à écrire sur
les effacés sans pour autant prétendre porter témoignage. L’auteur procède
notamment à la reconstitution de l’espace dans lequel Pinagot a vécu, il tente
de saisir ce que pouvaient être ses sentiments d’appartenance communale, ses
représentations du passé. L’ouvrage a néanmoins été critiqué pour avoir négligé
certaines sources :